CAMARET
LE PÉNIBLE VOYAGE DU CAPRICE. — Nous avons eu l'occasion de nous entretenir avec M. Eugène Mélénnec, patron du langoustier Caprice, rentré tout récemment d'une campagne de pêche qui dura plus de trois mois, dans les parages de Mogador, et voici ce que nous apprîmes :
Parti vers le 10 novembre de Mogador, la traversée du cap Saint-Vincent, aux abords du cap Finisterre, se passa pour le mieux. Le Caprice longeait, vent arrière, la côte du Portugal quand, par le travers de l'île Salvora, une furieuse tempête de S.-O., accompagnée de brume, fit une subite apparition. Le langoustier se réfugia momentanément sous le vent de l'île Salvora et un conseil fut tenu à bord. Le patron, tout confiant en sa barque, désirait continuer sa route. Les matelots tout d'abord étaient d'un avis contraire, mais après avoir écouté les conseils du patron, ils décidèrent de continuer la route.
Après avoir diminué de toile, saisi le matériel, le Caprice, en quelques bordées, quittait son abri et cap au large « entrait dans la plume ».
|
La mer était démontée, la tempête soufflait en furie.
La brume étant venue à se dissiper, nos hardis marins aperçurent un paquebot à la cape, que la mer recouvrait par moment. Plus loin, un deuxième n'était pas à la noce non plus. Vu ensuite un grand cargo qui paraissait être en très grande difficulté.
Pendant ce temps, le Caprice, véritable coque de noix, continuait sa route. Ses voiles furent déchirées, les écoutes de foc s'arrachèrent et la réparation fut vite faite.
— On nous avait dit « marche ou crève », nous dit un des matelots, il fallait bien marcher pour ne pas crever.
Une fois de plus, les langoustiers font honneur à leurs constructeurs camarétois. Alors que cargos et paquebots étaient en sérieuses difficultés, que des S. O. S. étaient lancés de part et d'autre, le Caprice, petit dundee de 40 tonneaux, six hommes d'équipage, rentrait en « père peinard », comme dit le brave Mélennec, au port de Camaret, avec trois tours de rouleaux et l'équipage avec le sourire. |
 |