Après la villa Antoine, on cambriole la villa Sauvaige, le premier atelier de Charles Cottet -:- Un assaut nocturne -:- Les confidences du poète Saint-Pol-Roux
Après la villa de M. Antoine, ancien directeur de l'Odéon, voilà qu'on cambriole celle du peintre Marcel Sauvaige, laquelle est située entre le manoir du poète Saint-Pol-Roux et la villa du romancier Georges-G. Toudouze, cette dernière mitoyennant avec celle de M. Antoine.
Où s'arrêtera le bon, ou plutôt le mauvais plaisir des seigneurs de la cambriole ?
M. Cabe, garde-champêtre, la brigade de Crozon et M. Martin, ancien maire de Camaret, ont enquêté, hier, dans la nouvelle demeure cambriolée. Tout y a été fouillé : armoires, tiroirs, comme précédemment chez M. Antoine.
Les mêmes mains opérèrent ici sans doute, le travail paraissant identique. Nul objet n'a disparu, non plus. On ne chercha que du pèze, évidemment. On a, sans doute, affaire avec des escarpes désirant ne pas se compromettre par quelque soustraction trop encombrante, meubles, linge, etc.... mais pénétrés de cette idée sonnante et trébuchante que l'argent volé ressemble comme un jumeau à l'argent honnêtement gagné.
La villa Sauvaige a son histoire*. C'est sous son toit qu'il y a quarante ans l'illustre peintre Charles Cottet peignit ses premières toiles bretonnes.
Cottet et son ami Sauvaige s'établirent à Camaret plusieurs années avant Georges Toudouze, Antoine et Sainl-Pol-Roux qui, avec quelques autres, formèrent la première phalange artistique de la mère Dorso, doyenne, alors, de Camaret.
Nous interrogeons, çà et là, dans les fermes, sur le quai. Personne ne sait ou ne veut savoir. Sur ce chapitre, Camaret devient le pays des bouches cousues. Les enquêteurs auront du fil à retordre pour aboutir, osons-nous dire... à l'épissure finale. Cependant...
Oui, cependant; car il y a un fil, et de fil en aiguille...
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On nous dit, en effet, que dans la nuit de lundi à mardi une bande de garnements défonça la porte d'un nommé Capitaine au village de Kermeur et entra, lampe électrique en main, épouvantant la brave femme et sa jeune fille.
Certains habitants, plus bavards que d'autres, se demandent s'il n'y aurait pas corrélation entre ce fait et les autres. Eh ! Eh... Connait-on ces jeunes gens ? Et, si on les connaît, sait-on lequel entra le premier, entraînant les autres ? Est-ce C... ? est-ce M... ? est-ce X, Y, Z ?
Qu'on arrête quelqu'un de la bande, si ce n'est fait déjà, et l'on obtiendra — qui sait ? — quelque chose qu'on recherche depuis le premier cambriolage.
Les coupables arrêtés, la justice devra faire l'exemple demandé par M. Antoine, deux fois cambriolé comme la Dépêche le soulignait, récemment.
Il faudra que la presqu'île de Crozon, peuplée de villas closes l'hiver, soit définitivement purgée de ces malandrins grisés d'alcool autant que de certains films à la morale douteuse. Il importe qu'une condamnation sévère mette fin à ce dangereux cycle d'aventures.
Par bonheur, à notre retour sur le bateau du Fret, nous trouvons le poète Saint-Pol-Roux, qui se rend à Brest à l'occasion d'un concert Sangrà. — J'aimerais vous renseigner, nous dit-il. Non pas que j'aie la bouche cousue, moi aussi, comme ces voisins dont vous me parlez, mais je ne sais rien de nouveau. Hélas ! un poète n'est décidément pas fait pour jouer les Sherlock Holmès, comme vous l'écriviez dernièrement. Fions-nous donc au zèle attentif des policiers.
Et notre grand ami nous entretient de ses occupations.
En son manoir, dans les premières rafales des « mois noirs », il élabore un triptyque verbal : l' Homme aux yeux de pervenche — c'est-à-dire Jésus — dont l'audition sera donnée à Paris, Lyon et Genève, en fin d'hiver, avec une conférence du vieil ami du maître, M. Antoine, justement, ce propriétaire indésirablement visité.
P. B. |
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