Nous analysions l'autre jour, dans nos Faits et Bruits, le rapport adressé au ministre de la Marine par M. Fabre, administrateur des Invalides, sur les naufrages de l'année 1889. Revenons sur ce document pour y prendre la partie qui doit le plus intéresser nos lecteurs : nous voulons parler du récit des principaux sauvetages accomplis sur les côtes du Finistère, qui a toujours sa large part dans ce genre d'événements :
Dans la tempête du 3 février 1889, à Camaret, par une mer affreuse, le lougre L.-G., cassant une de ses chaînes et chassant la seule ancre qui lui restait, était poussé vers la côte. La perdition corps et biens eût été certaine si le patron de la chaloupe de pêche le Jeune-Gabriel, Callec (Louis), ne s'était porté, avec ses cinq hommes, au secours du navire, qui dérivait vers un banc de roches sur lequel la mer brisait avec fureur.
Ces braves gens réussirent à mouiller une ancre à jet et à porter à bord du L.-G. le bout d'un grelin ; trois d'entre eux étant montés sur le lougre en perdition pour aider à la manoeuvre, l'échouement fut évité, et le bâtiment, solidement amarré, put attendre en sureté la fin de la tempête.
Le même jour, dans le même port, le brick-goëlette le Souvenir,
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monté par six hommes d'équipage, cassait ses chaînes et était jeté à la côte. Le navire était ballotté si rudement par les lames que sa destruction semblait imminente. Il fallut s'efforcer, sans perdre une minute, d'opérer le sauvetage des hommes. Les préposés des douanes, qui se font une spécialité du maniement des engins porte-amarres, se hâtaient d'accourir, mais ils étaient éloignés du lieu du sinistre.
Le commissaire de l'inscription maritime de Camaret prit alors la résolution d'établir un va-et-vient entre le navire et le rivage.
Le garde maritime Raoul et le matelot pêcheur Garrec entrèrent intrépidement dans l'eau ; le patron Taniou, les sieurs Mérour, Meilard, Dagorn, Le Joly, Le Hir, Boëzennec, Rouin, suivirent cet exemple. Roulés plusieurs fois par les lames, ces braves gens, après des efforts surhumains, réussirent à saisir la chaloupe du brick-goëlette et à établir ainsi une communication avec la terre.
Un à un, les hommes de l'équipage furent sauvés.
Les sauveteurs, à sept reprises différentes, durent s'exposer à la lame, et risquer leur vie pour lancer l'embarcation à la mer et la haler ensuite à terre avec le naufragé qui y était descendu. [...] |
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