Camaret, 17 juin.
Helluin et Salaun !
Autour de leurs frères d'armes assemblés, la ville pleure les deux aviateurs écrasés sur la falaise l'autre jour...
Elle qui fut d'un combat très ancien, la Vieille Chapelle, s'est, maternelle, comme ramassée sur elle-même pour recueillir tant de prières sous ses vastes ailes d'ardoise : elle sait bien les chagrins de la guerre, la légendaire mutilée, dont la frêle cloche du clocher frappé jadis demeure encore pour ces glas d'aujourd'hui et pour les gloires de demain.
Les corps des deux martyrs ne gisent point sur les tréteaux — on est venu trop vite nous en séparer — mais nous sentons leurs âmes, égales par le sacrifice, frissonner d'un pilier à l'autre, planer dans la voûte en berceau, descendre sur nos fronts emplis de leur pensée, puis sourire à leurs frères debout, là, serrés en phalange derrière Jean Pouyer, chef intrépide et sans rival.
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Ah ! comme, tout à coup, nous les comprenons mieux, ces hauts gardiens de nos rivages menacés ! comme, devant la mort brutale, nous voulons davantage les glorifier, tous ces héros qui chaque jour montent la défier, afin que notre vie à nous, pauvres hommes, soit sauve...
Et par la foi naïve de nos jeunes ans, soudain revenue, nous percevons que les êtres divins les glorifient aussi, car du missel, car des tableaux, car des autels, il nous semble bientôt que les anges du ciel, peints ou sculptés tendrement les regardent, ces anges de la terre et les admirent de toutes leurs prunelles de mystère et d'infini !
Si ceux-là veillent Dieu, ceux-ci veillent les hommes, leur force est parallèle et leur beauté pareille.
Au grand jardin de la Mémoire, oh ! dites, cultivons fidèlement le souvenir de ceux qui meurent à la peine pour nos joies futures !
SAINT-POL-ROUX. [...] |
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